NOTE 7
Berger était après Himmler le personnage le plus important dans l’organisation des Waffen S.S. Sa voiture personnelle portait le n°2. Celle de Kaltenbrunner seulement le n°3. Kersten n’eut qu’à se louer de la loyauté de Berger, mais ce fut en 1944, au sujet des représailles ordonnées contre les prisonniers de guerre, que le docteur conçut la plus vive admiration pour lui.
Les avions alliés faisaient des dégâts de plus en plus grand par leur mitraillage au sol. Pour se venger de ces dévastations, Hitler, à la fin de l’année 1944, ordonna de faire exécuter cinq mille officiers anglais et américains détenus dans les camps de prisonniers de guerre.
Ce fut naturellement Himmler qui transmit à Berger l’ordre de ce massacre.
La scène se passait le 7 décembre 1944, au Q.G. de la Forêt-Noire. Kersten y assistait.
— Choisissez cinq mille officiers anglais et américains dans les camps, dit Himmler au général, conduisez-les à Berlin et faites-les tuer en représailles.
— Pour rien au monde, répliqua Berger sans hésiter un instant. Je suis un soldat et non un assassin.
— C’est un ordre du Führer, dit Himmler.
— Alors, exécutez-le vous-même, dit Berger. Moi, je refuse. Ce n’est pas un métier de soldat.
— Mais c’est un ordre de Hitler ! Du Führer.
— Alors, qu’il l’exécute lui-même, dit Berger.
— Vous vous rendez compte que vous refusez d’obéir à un ordre du Führer ! cria Himmler, hystériquement. Je vous enverrai devant un Conseil de Guerre.
— Ça m’est égal, dit Berger. Vous pouvez me faire tuer, je ne deviendrai pas un assassin. Et aussi longtemps que je serai commandant des camps de prisonniers, on ne touchera pas à la vie d’un seul d’entre eux.
— Alors, vous abandonnez Hitler ?
— Non, je lui sauve la face, cria Berger.
El il quitta la pièce.
Himmler dit à Kersten avec une rage impuissante qui faisait trembler sa voix :
— Maintenant, je ne peux rien faire contre lui. J’ai trop besoin de ses services. Mais après la guerre, il n’échappera pas à la cour martiale.
Plus tard, dans la journée, Berger dit à Kersten :
— En cas de coup dur, j’ai assez de canons contre Himmler. Tous les Waffen S.S. sont pour moi.
Au procès de Nuremberg, Berger fut condamné à vingt-cinq ans de prison. Mais son attitude générale pendant la guerre et surtout son refus qui empêcha le meurtre de cinq mille officiers alliés (Kersten avait chaudement témoigné pour lui) lui valurent d’être libéré après cinq ans.
Il dirige maintenant une fabrique de tringles à rideaux.